Cette étude exploratoire porte sur l'analyse de récits de sujets traumatisés psychiques en s'appuyant sur les méthodes récentes d'analyse du discours développées en France par Ghiglione et Blanchet (1991, 1998). Nous avons cherché à savoir comment les sujets traumatisés psychiques expriment leurs différentes réactions émotionnelles à l'événement traumatique. Nous nous attendions à retrouver des indices discursifs caractéristiques de l'alexithymie au niveau de l'expression de leurs réactions émotionnelles à l'événement traumatique c'est-à-dire une inhibition de l'expression verbale des émotions, un discours factuel, descriptif et objectif, une diminution de l'engagement personnel et une difficulté à fournir des explications à la violence de l'événement. L'étude montre que les sujets traumatisés psychiques ne sont pas dans l'incapacité d'exprimer leurs émotions, mais ils semblent plutôt présenter une forme de décalage dans l'expression émotionnelle davantage associée aux symptômes plutôt qu'à la représentation de l'événement traumatique censé pourtant être à l'origine des symptômes; ce décalage pourrait être lié à une particularité principale de l'alexithymie. Par ailleurs, l'étude montre que la répartition des différents indices langagiers selon les thèmes évoqués constitue des pistes de travail intéressantes qui impliquent une mise à l'épreuve par des méthodes comparatives.