Points essentielsLa douleur neuropathiquepeut être conceptualisée comme le résultat d’un processus d’« apprentissage aberrant », lié aux capacités de plasticité du système nerveux.Les modifications périphériquesdécrites dans les modèles animaux sont multiples, et leur rapport avec les différents symptômes est loin d’être élucidé. En périphérie, on note singulièrement des décharges ectopiques dans les fibres myéliniques lésées, une activité anormale dans des fibres non lésées, une surexpression des canaux calciques, donnant lieu à une augmentation de la libération de neurotransmetteurs excitateurs, et des phénomènes d’arborisation sympathique vers le ganglion rachidien.Les mécanismes médullairescomportent une sensibilisation centrale, des phénomènes d’embrasement et de potentiation à long terme. Ces phénomènes seraient sous-tendus par des changements de connectivité – encore controversés – des terminaux non nociceptifs, et des variations de sensibilité des récepteurs post-synaptiques. Contribueraient aussi à ces modifications physiopathologiques l’atténuation de l’inhibition spinale par perte neuronale sélective et le développement de phénomènes inflammatoires, avec sécrétion de cytokines par les macrophages et les cellules gliales.Les modifications dans la corne postérieure médullairemodifient l’activité des projections vers le tronc cérébral qui, par des boucles rétroactives, augmentent encore l’hyperactivité spinale. Ces effets sont retardés, suggérant que la sensibilisation spinale nécessite, pour être entretenue, la mise en jeu de mécanismes de facilitation descendante impliquant le tronc cérébral.Tous ces phénomènes entraînent des changements d’activité des réseaux thalamocorticaux, qui développent des processus autonomes à même d’entretenir la douleur.La représentation corticaledes territoires corporels change après lésion nerveuse, et ces changements pourraient être corrélés à la survenue de douleurs.L’allodynie et l’hyperalgésieneuropathiques s’accompagnent de modifications corticales très incomplètement reproduites par les modèles expérimentaux. L’allodynie expérimentale et l’allodynie neuropathique partagent l’activation de la « matrice douleur » corticale, ainsi que la bilatéralisation des activités insulaires. Néanmoins, alors que l’allodynie expérimentale tend à accroître l’activité des réseaux limbiques et affectifs du cortex périgénual et orbitofrontal, ce sont les procédures d’analgésie qui conduisent à l’hyperactivité de ces mêmes structures en situation d’allodynie neuropathique. Cela laisse supposer que leur rôle dans l’allodynie expérimentale serait réactif et protecteur, et que l’incapacité à générer leur activation pourrait contribuer à l’expression clinique de la douleur neuropathique.