Cet article retrace l’histoire des médicaments antipsychotiques injectables à action prolongée (IAP), ainsi que les interactions réciproques entre cette méthode thérapeutique et l’évolution des conceptions concernant la schizophrénie et sa prise en charge. Le premier neuroleptique d’action prolongé (NAP), l’énanthate de fluphénazine, fut introduit en 1966. Les NAP se sont révélés très adaptés au traitement des patients schizophrènes dans des centres de soins extrahospitaliers et ils ont donc facilité l’essor du mouvement qui fut dénommé psychiatrie de secteur en France etcommunity psychiatrydans des pays anglophones. Les NAP furent introduits initialement pour améliorer l’observance thérapeutique. En fait, ils n’empêchent pas l’inobservance mais la rendent visible plutôt que secrète. Le nombre de publications consacrées aux traitements IAP est resté relativement bas, pendant une quinzaine d’années, entre 1987 et 2002, jusqu’à l’introduction des antipsychotiques atypiques. Un regain d’intérêt pour les IAP a été observé en 2003, avec l’apparition d’un premier antipsychotique atypique d’action prolongée (APAP). Les APAP se distinguent des NAP par l’évolution des technologies permettant de construire une formulation à effet prolongé et par leur utilisation à une époque où les objectifs thérapeutiques ne se limitent pas au contrôle des symptômes positifs mais s’adressent aussi aux symptômes négatifs et à la cognition.