IntroductionLe nævus congénital géant (NCG) est une tumeur néonatale rare touchant 1 à 2 % des nouveau-nés. La forme tumorale est exceptionnelle, avec 5 cas décrits dans la littérature. Le risque de transformation en mélanome malin (MM) est estimé entre 2 et 5 % mais le diagnostic différentiel avec les nodules de prolifération (NP) atypiques est difficile. Aucune caractéristique (clinique, évolution, histologie, immunohistochimie (IHC) ou biologie moléculaire) n’a, à ce jour, démontré sa capacité à les différentier clairement. Cependant, de nouvelles techniques voient le jour. Nous rapportons un cas de NCG tumoral avec NP atypiques, exploré avec les méthodes diagnostiques les plus récentes. Les résultats étaient en faveur d’un MM mais l’évolution favorable à 6 ans va contre ce diagnostic.ObservationUn nouveau-né présentait à la naissance une tumeur cervico-mandibulaire de 15 cm. L’imagerie en résonance magnétique (IRM) montrait une extension para-pharyngée et une lyse osseuse. L’examen anatomopathologique concluait à un NCG avec des NP parfois atypiques. Les cellules exprimaient fortement KI67 et P53 mais étaient négatives pour HMB45. Le diagnostic de MM était retenu après avis d’un comité d’experts. Le bilan d’extension était négatif. Devant le caractère inextirpable de la tumeur étaient décidées des exérèses partielles itératives et une surveillance. En 2017, à 6 ans, l’enfant était asymptomatique. De nouveaux marqueurs étant disponibles, des analyses IHC complémentaires ont été demandées, montrant une perte d’expression de la 5-hydroxyméthylcitosine et pas de H3K27me3. Les données de l’hybridation génomique comparative montraient des gains de la totalité des chromosomes 2, 6, 8, 13 et 20 mais également des déséquilibres segmentaires sur les chromosomes 9 et 17 et la présence d’une délétion homozygote du gèneCDKN2A(P16, 9p21) décrite dans des cas de MM familiaux (Fig. 1 et Tableau 1).DiscussionIl s’agit du premier cas de NCG tumoral avec des NP atypiques exploré à l’aide des plusieurs méthodes diagnostiques les plus récentes, et suivi pendant plusieurs années. Certaines caractéristiques sont en faveur du diagnostic de MM, alors que l’enfant survit sans métastase à 6 ans. Ces nouvelles techniques ne permettent donc pas de conclure et ce cas illustre les limites diagnostiques qui persistent entre NP atypique et MM sur NCG. Nous rapportons la présence d’une mutation homozygoteCDKN2A(P16, 9p21) décrite dans des cas de MM familiaux. Sa signification est incertaine mais incite à une surveillance rapprochée. À l’inverse, l’évolution favorable avec un recul de 6 ans n’est pas en faveur d’un MM. En effet, en cas de MM avant l’âge de 2 ans, ceux qui ont eu une évolution défavorable sont décédés précocement (médiane de survie à 8,9 mois, extrêmes 0 à 24).ConclusionIl est important de rapporter de tels cas afin de faire progresser les connaissances sur les NCG et l’interprétation des outils diagnostiques disponibles.