Le drainage prophylactique abdominal en chirurgie digestive est une attitude répandue, son rationnel est qu’il permettrait de dépister précocement les complications (fistule digestive, hémorragie, ou fuite biliaire), d’éviter les collections, et de réduire la morbi-mortalité postopératoire et la durée d’hospitalisation. Le but de cette mise au point était d’évaluer les niveaux de preuve supportant la mise en place d’un drainage systématique prophylactique après gastrectomie, pancréatectomie, hépatectomie, et proctectomie. À partir d’une revue de la littérature : (i) il n’a été retrouvé aucun argument en faveur du drainage après gastrectomie partielle ou totale sur la diminution de la morbi-mortalité postopératoire, ni sur l’aide au diagnostic ou à la prise en charge d’une fistule ; cependant le niveau de preuve est faible, (ii) après résection pancréatique, les données sont contradictoires, et si l’absence de drainage est suggérée comme délétère, les données semblent être en faveur d’un drainage court, (iii) après chirurgie hépatique programmée sans anastomose bilio-digestive, il existe un fort niveau de preuve sur l’absence de bénéfice au drainage, et (iv) en cas de proctectomie, les données sont insuffisantes, mais les résultats de l’essai randomisé multicentrique français GRECCAR5 (NCT01269567) apporteront cette année des éléments décisionnels. Les données suggèrent qu’une attitude de drainage systématique de la cavité abdominale en chirurgie digestive est obsolète, sauf en cas de pancréatectomie où on s’oriente vers un drainage court. Si le niveau de preuve est élevé pour la chirurgie hépatique, d’autres essais randomisés sont attendus en chirurgie gastrique, pancréatique, et rectale.