Nouvelles données pathophysiologiques sur l'hypersensibilité à l'aspirine (syndrome de widal) ; conséquences diagnostiques et thérapeutiques. Discussion
Auteurs : DE WECK A1, SANZ M2, GAMBOA P3, NORDMANN R, ROCHEMAURE J, MENKES C, MOLINA C, MICHEL F1L'hypersensibilité à l'aspirine se manifeste le plus souvent par un syndrome clinique associant une rhinite chronique, une polypose nasale et des crises d'asthme exacerbées par l'ingestion d'aspirine ou d'autres médicaments anti-inflammatoires non stéroidiens (AINS). Ce syndrome a été décrit pour la première fois par Widal en 1922. Jusqu'à récemment, le mécanisme pathophysiologique de l'hypersensibilité aux AINS était resté quelque peu mystérieux. Le fait que les médiateurs principalement impliqués sont les sulfidoleukotrienes (LTC4, LTD4, LTE4) et que les médicaments impliqués ont pour caractéristique commune d'inhiber la cyclooxygénase-1 (COX-1) a fait présupposer une anomalie pharmacogénétique dans le métabolisme de l'acide arachidonique chez de tels patients. Une étude immunopharmacologique portant sur l'activation des basophiles détectée par cytométrie de flux et la production de sulfidoleukotrienes in vitro en présence d' AINS, dont les résultats sont brièvement présentés, ainsi que d'autres études passées en revue permettent d'établir que: - les basophiles des patients atteints du syndrome de Widal sont hyperactivés de manière non spécifique, probablement sur la base d'une inflammation chronique au niveau de la peau ou des voies respiratoires ; - ces basophiles hyperactifs produisent des quantités augmentées de sulfidoleukotrienes mais diminuées de PGE2 sous l'effet d'AINS. Ces constatations ont permis pour la première fois d'établir un test diagnostique in vitro, susceptible de remplacer dans bien des cas le test de provocation, considéré jusqu'ici comme la seule procédure permettant objectivement de confirmer le diagnostic. Les données accumulées permettent désormais de formuler pour le syndrome de Widal une pathogénie impliquant l'effet conjoint d'une inflammation chronique entraînant une hyperactivité cellulaire non spécifique, particulièrement des mastocytes, basophiles et éosinophiles et d'une anomalie pharmacogénétique du métabolisme del'acide arachidonique. La combinaison de ces deux facteurs aboutit à une surproduction des médiateurs inflammatoires tels que les sulfidoleukotriènes et à une diminution de la prostaglandine antiinflammatoire PGE2. Ce concept permet d'expliquer la plupart des observations cliniques sur l'apparition et l'évolution du syndrome de Widal et offre une base rationnelle pour une approche thérapeutique.