Grossesse et alcool. Consommation minime et irrégulière : peut-être sans risque
Date 2011, Vol 31, Num 337, pp 837-843Revue : La revue Prescrire• De nombreuses femmes enceintes consomment des boissons alcooliques en plus ou moins grande quantité. Pourtant, diverses recommandations préconisent une consommation nulle d'alcool pendant la grossesse. • En 2011, que sait-on des méfaits d'une consommation d'alcool sur le déroulement de la grossesse et sur les enfants à naître ? Pour répondre à ces questions, nous avons réalisé une synthèse des données disponibles selon la méthode habituelle de Prescrire. • Un syndrome d'alcoolisation fœtal est présent chez environ 5 % des enfants exposés au cours de la grossesse à une consommation d'alcool régulière d'au moins 5 verres standard par jour (c'est-à-dire 50 g d'alcool par jour). Ce syndrome associe dysmorphie faciale, retard de croissance et retard mental. • Quatre études ont exploré le lien entre consommation importante d'alcool sur une courte durée et la survenue de troubles cognitifs chez les enfants exposés. Les résultats ont été peu probants, et les analyses n'ont pas pris en compte une éventuelle consommation chronique d'alcool concomitante. Une étude de bonne qualité méthodologique a observé un lien avec des anomalies neurologiques (convulsions, épilepsie) en cas de consommation importante sur une courte durée entre les 11e et 16e semaines de grossesse. • Un risque de troubles cognitifs et comportementaux chez les enfants n'est apparent que pour des consommations régulières d'alcool à partir de 2 verres standard par jour. • De nombreuses études, portant sur environ 150 000 grossesses au total, ont recherché un lien entre consommation minime d'alcool et anomalie du déroulement de la grossesse. Très peu ont montré un lien statistiquement significatif et leurs résultats sont fragilisés par le manque de prise en compte des autres facteurs de risque. • Une consommation hebdomadaire égale ou supérieure à 5 verres standard pendant la grossesse a été associée à un risque accru de cryptorchidie chez les garçons. Diverses études, portant sur 57 000 grossesses au total, n'ont pas montré qu'une consommation minime d'alcool ait un effet malformatif. Une étude de 1 000 grossesses a montré une augmentation statistiquement significative du risque de malformation majeure, mais cette étude semble biaisée. • Un lien entre mortalité infantile et consommation d'alcool pendant la grossesse a été recherché dans de vastes cohortes. À partir d'une consommation d'au moins 4 verres standard par semaine, le risque de mort néonatale précoce a semblé augmenté, majoré par le tabac. Une consommation quotidienne d'alcool pendant la grossesse est à déconseiller. • Pour reconnaître les femmes enceintes à risque en raison de leur consommation d'alcool, aucun outil ne remplace l'entretien abordant ce sujet avec les femmes. Quelques questionnaires spécifiques peuvent être utiles en complément (questionnaires T-ACE et Tweak). • Les femmes réduisent souvent d'elles-même leur consommation d'alcool en début de grossesse. Un essai a montré que chez des femmes ayant une consommation à risque, les informer de manière répétée sur les risques pour la grossesse et l'enfant, réduit plus leur consommation que leur remettre un simple dépliant. • En pratique, il est important d'informer des risques liés à la consommation d'alcool durant la grossesse, mais de manière nuancée, sans dramatiser une éventuelle consommation minime d'alcool.